Trouble à Séoul, partie 3



Le lendemain matin, c'est sous un soleil radieux que j'ai retrouvé Aspasie. Soleil radieux mais températures négatives : BOUDIOU ce qu'il caillait ! Aspasie m'avait prévenue avant mon départ, donc j'avais un peu anticipé en enfilant des collants sous mon pantalon et en superposant les couches de vêtements sous ma doudoune.

Nous avons un marché un peu dans Dongdaemun, avant de passer sous un marché couvert. Mon estomac a tant bien que mal résisté à la tentation des stands de nourriture : galettes de légumes luisantes d'huiles, raviolis à la vapeur (mandu), pâtisseries à la cannelle... Je ne savais plus où donner de la tête. Bon, il y avait aussi des choses moins ragoûtantes telles que de la peau de porc grillée ou des pieds de cochon. Là, forcément, ça me faisait moins envie (surtout que le pied de porc, Tonton s’est déjà chargé de m’en faire manger au temps jadis et je suis encore traumatisée).

Nous avons retrouvé un ami d'Aspasie, Ji Ung (surnommé plus tard "boys-band" par Sidonie, en raison de son port permanent de lunettes de soleil. Et oui, nous étions comme ça nous : devant de notre difficulté à retenir les noms des personnes rencontrées sur place, nous leur attribuions de jolis surnoms, histoire de nous y retrouver un peu). Il était accompagné d'un ami à lui, qui ne parlait guère anglais et avec qui la communication était par conséquent un peu limitée.

Nous sommes allés mangés dans un petit restaurant qui ne payait pas de mine, et dont la patronne était très bruyante et rabattait le client en braillant dans la rue. L'après-midi, nous avons visité le palais de Changdeokgun. Je me suis émerveillée devant ce superbe contraste qu'offre Séoul : un vieux palais, aux courbes typiques de l'architecture asiatique ancienne, à quelques mètres de buildings modernes aux façades vitrées. A titre personnel, cela m'a rappelé un vieux jeu vidéo où le héros doit déjouer un complot au sein de la Cité Interdite de Pékin, ou encore le début du film Mulan (je vous présente toutes mes excuses pour ces références qui ont le défaut de mettre toute l'Asie dans le même sac, ce contre quoi je milite, mais c'est vraiment le ressenti que j'ai eu à cet instant). J'ai également été frappée par le calme qui régnait dans ces lieux : en fermant les yeux, impossible de deviner que nous nous trouvions au sein même d'une capitale de plus de dix millions d'habitants.

Nous n'avions pas de guide anglophone mais boys-band nous a fort aimablement traduit les anecdotes intéressantes contées par un guide parlant coréen. Après le palais, nous avons visité les jardins, qui donnaient également l'occasion de faire de très jolies photos, entre deux gorgées de café en canette dont le but initial de l'achat était surtout de nous réchauffer les mains.

Après la visite du palais, nous avons pris le chemin d'un salon de thé/café pour faire le plein de glucides, nous arrêtant en cours de route pour déguster une brochette de poulet bien épicée. Si mes propos vous semblent incohérents, c'est tout à fait normal. Je ne sais s'il s'agit des habitudes limitées aux gens rencontrés ou plus générales, propres aux locaux, mais nous avons passé notre temps à manger. Partout, tout le temps, à n'importe quelle heure. Les façades des restaurants sont des appels à la débauche alimentaire, avec des photos de plats à faire saliver les papilles. Quant aux vendeurs ambulants qui préparent à manger sous vos yeux, impossible d'y résister. D'où l'achat de la brochette de poulet à une heure improbable de l'après-midi. Notez que le concept "On passe son temps à se goinfrer" était très loin de me déplaire, étant moi-même un estomac sur pattes.

Après la pause café (et la dégustation d’une pseudo-tarte-tatin), nous nous sommes, en toute logique, dirigés vers... Un restaurant ! Les restaurants coréens sont chouettes : en plus du plat que l'on commande, on vous apporte une multitude de choses à grignoter dans des petites assiettes : pousses de soja, gâteaux à base de poisson, ou encore (et surtout) du kimchi (plat de chou fermenté).

Après le restaurant, boys-band et son ami pas bavard nous ont ramenées à l'auberge, où nous devions nous refaire une beauté. C'est donc fraîches, pimpantes et juchées sur nos talons que nous avons repris le métro en direction de Sinchon, à vingt minutes en métro de Dongdaemun. Aspasie avait un plan bien précis en tête : le bar de pop Coréenne (K-pop). Comme son nom l’indique, ce bar diffuse des tubes de pop plus ou moins récents, et les clients peuvent choisir les chansons qui sont jouées (et je m’en suis donné à cœur joie).

Notre entrée au Damotori (c'est le nom du bar, qui allait bientôt devenir notre QG) n'est pas vraiment passée inaperçue. Non seulement nous étions deux occidentales, mais en plus toutes pomponnées (alors que les filles étaient toutes en pull-over et baskets). On se sentait un peu TROP habillées pour l’endroit, mais cela ne nous a point déstabilisées.

Nous avons fait le plein de soju bomb, mélange de soju et de boisson énergisante du genre Red Bull (bombe glycémique par excellence, heureusement que j'ai remué du popotin pour éliminer tout ça) et puis nous avons commencé à noter des titres de chansons coréennes connues sur des bouts de papier que nous remettions au serveur/DJ, plus tard renommé "le sexy du Damotori" par mes soins. 

Dans ma jeunesse, j'ai toujours eu un faible pour la gent masculine asiatique, qui s'est estompé au fil des années. Et bien ce goût prononcé pour le mâle oriental m'est revenu au fur et à mesure de mes errances dans la capitale sud-coréenne. J'affirme même avec certitude que tout a recommencé ce soir-là. Parce que le petit monsieur là, il avait beau porter un fort peu seyant pull en laine-tricoté-par-grand-mère, il était quand même bien charmant. Mes rêves de mariage mixte et de descendance aux yeux en amandes ont toutefois volé en éclats quand le collègue de ce dernier m'a informé que mon mignon n'était plus disponible sur le marché du célibat. La vie est parfois injuste.

Enfin, cela ne m'a guère empêché de m'amuser, de danser et de chanter à tue-tête. Autour de nous, les gens faisaient de même, mais deux d'entre eux se sont démarqués : deux petits jeunes (bon ils avaient tous l'air jeune ceci dit) qui enchaînaient les chorégraphies les unes après les autres. Quelle que soit la chanson jouée, plus ou moins récente, ils connaissaient les mouvements PAR CŒUR et de façon parfaitement synchronisée. J'étais sciée. Et profondément persuadée qu'en Europe personne ne me croirait d'avoir assisté à pareil spectacle.

(A suivre)

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